samedi 31 mars 2018

"Un fragile espoir" d'Hannah Richell.

2013 - Belfond.
Traduit de l'anglais par Michèle Valencia.
424 pages.

A chacun sa boite à Pandore ...


Le roman s’ouvre sur une scène terrible : une jeune femme se jette dans la Tamise. Qui est-elle ? et surtout, pourquoi un tel geste, si désespéré ?
Dora, jeune femme enceinte, brisée par son passé, souhaite vaincre ses démons qui la hantent et l’empêche d’avancer dans son existence et d’apprécier pleinement son bonheur. Elle décide d’annoncer la nouvelle à sa mère et peut-être d’amorcer un début de dialogue rompu à son adolescence. Avec appréhension, elle retourne à Clifftops, la maison familiale dans le Dorset. Une campagne tranquille qui abrite des baies isolées, des plages de sable et des falaises impressionnantes. Le paradis sur carte postale où dix ans plus tôt, son jeune frère, Alfie, de 4 ans est décédé accidentellement. Depuis, un terrible sentiment de culpabilité la ronge accentué par l’attitude et les paroles de sa mère qui résonnent sans fin. Ce drame conduira à l’éclatement et au déchirement de toute la famille Tide. Tous éprouvent cette émotion insidieuse et omniprésente : la culpabilité. Ils se reprochent de ne pas avoir assez aimé ou protégé le plus jeune et le plus fragile d’entre eux.

En parallèle, ce roman nous emmène à suivre les traces passées et présentes de trois femmes ;  deux sœurs Cassie et Dora et leur mère Helen. Les chassés-croisés entre deux époques et les différentes voix narratives nous dévoilent les choix individuels, les circonstances du drame. Nous nous attachons aux personnages dans leur deuil, leur colère, et leur l’angoisse continuelle. Les relations se compliquent.

  "Elle pleure une décennie de regrets et, à nouveau, le petit être qu’ils ont perdue à jamais." (p 178).

"Helen acquiesça, mais elle sentait son cœur se briser lentement, comme une bûche à moitié consumée qui s’effondre sur un tas de cendres froides." (p 205).

L’état dépressif d’Helen, alternance de tristesse et d’apathie, provoque chez elle l’idée qu’elle ne récupérera jamais le goût de vivre. Elle renonce à ses deux filles, refuse de communiquer avec son entourage et s’enferme peu à peu dans cette maison campagnarde qu’elle appréciait si peu ; un mausolée de souvenirs et de châtiments. Les deux adolescentes grandissent, seules, suivant leur personnalité, elles abordent  l’accident différemment. Cassie se révolte, elle refoule sa tristesse derrière une grande colère,  jusqu’à vouloir fuir, s’échapper. Dora se referme sur elle-même, solitaire et brisée. Nous partageons la tourmente et les souffrances de toute une famille. Seul, le père Richard ne s’exprime pas. Nous connaissons ses états d’esprit seulement par ses dialogues et attitudes.

"Chacune semblait enfermée dans sa sphère privée de souffrance et ne pouvait s’approcher des autres, incapable de les regarder en face, de leur parler du tourment qu’elle endurait. Elles avaient été brutalement séparées, comme les feuilles jaunissantes qui commençaient à tomber en voltigeant au vent d’automne glacial. " ( p 209).

L’utilisation prononcée d’analepses nous éclaire sur le passé des personnages et leur psychologie. La mort tragique du jeune Alfie renvoie tout son entourage à leurs limites et leur impuissance. Comment faire face au chagrin ?  Comment survivre et continuer à éprouver des sentiments ?

J’ai beaucoup aimé l’écriture  d’Hannah Richell ainsi que le schéma de son roman. Malgré le thème abordé, la mort tragique d’un enfant et ses conséquences : vies brisées, bonheur et avenir égarés ; le récit reste lumineux, la boîte de Pandore ouverte, il ne reste au fond plus que l’espoir,  la vie reprend le dessus ! Difficile d’oublier une telle histoire.

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Brève sur la romancière, Hannah Richell se consacre à l’écriture après des débuts dans l’édition. Son premier roman, « Un fragile espoir » parait chez Belfond en 2014 ; son deuxième livre, « la maison du lac » est sorti en 2015.  Elle vit aujourd’hui en Australie avec sa petite famille. Son prochain roman, « Peacock Summer' sortira en anglais courant juin 2018. A suivre pour la version française …_____________________________________________________________________

mercredi 28 mars 2018

"Paranoïa" T 1 de Melissa Bellevigne.

Un premier roman intéressant, un premier tome prometteur ...


2016 - Hachette (Black Moon) -
312 pages.
Pour la petite histoire, Melissa Bellevigne a toujours été amoureuse des mots. Poussée par une imagination débordante, elle écrit très tôt, secrètement certaine qu’un jour, ce sera son métier. A la naissance de son premier enfant, elle décide d’ouvrir un blogGolden Wendy, pour garder un pied dans l’écriture et partager ses conseils dans des chroniques principalement orientées beauté et maternité. En avril 2015, son deuxième petit garçon voit le jour, et, elle se replonge dans la rédaction de ses romans avec passion. Son premier roman, "Paranoïa" "sort en mars 2016 et " Miroir " en 2017 aux éditions Hachette , collection Black Moon.
...

Lisa Hernest, psychiatre de renom se voit confier un cas complexe à l’institut St Vincent, à côte de Paris. Elle y rencontre Judy Desforêt, jeune femme de 20 ans, hospitalisée à la suite d’une violente agression à Londres. Depuis son enfance, elle souffre de troubles hallucinatoires à tendance paranoïaque. Elle a toujours partagé son existence avec son ami imaginaire ; un adulte appelé Alwyn. Et pour rien arranger, elle est enceinte de cinq mois et refuse de s’alimenter.

En parallèle, nous suivons le récit bien étrange et délirant de Judy accompagnée de son ami Alwyn, personnage invisible ; pourtant, elle semble faire preuve de lucidité. Et Lisa, femme active et responsable qui cache de profondes fêlures. Les deux personnages principaux s’entremêlent et se confondent parfois dans leurs souffrances et désirs inassouvis. Leurs histoires, du moins l’interprétation donnée se déroulent au fur et mesure donnant corps au délire de la jeune Judy. L’épisode londonien force aux interrogations. La psychiatre affirme le coté cartésien, refrénant nos imaginations. Lisa s’investit de trop touchée par sa fragilité et cette grossesse rejetée. Elle désire vraiment l’aider ! 

"Malgré mon métier et mon expérience, la frontière entre sa réalité et son imaginaire était si floue qu'elle m'impressionnait ; je m'étais attendue à ce qu'elle me réponde que, non, elle n'avait pas ce courrier en sa possession." (p 104).


J’eus préféré des accents plus prononcés sur la maladie paranoïaque et les délires hallucinatoires entrecoupés de signes paranormaux pour vraiment intensifier les doutes. Nous sommes plutôt bercés par l’histoire de Judy sans réellement nous questionner.

"Orchidées, roses, violettes, lys, coquelicots, une variété infinie de pétales semblait s’amuser à dessiner une aquarelle de contes de fées, créant un véritable tapis de couleurs." (p 285)


Un seul gros point noir ! La couverture : " L’une est la seule à le voir. L’autre est la seule à la croire. " Un résumé publicitaire totalement erroné qui peut malheureusement frustrer les lecteurs dans leurs attentes !!!

Une lecture facile, fluide que j'ai terminé sans trop de peine, sans mentir, j'ai été charmée par ce premier tome et je vais lire la suite sans attendre !
Si délires psychotiques, que cachent-ils ? L'intrigue reste intéressante et assurément donne  l’envie d’en découvrir plus ; un rôle prescrit à ce premier tome …